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Auteur : Homère – Traduction : Victor Bérard – Editions : Gallimard, collection Folio classique – Parution : 05/01/1973 – 608 pages – prix : 8,50 € – genre : poésie, antiquité
Quatrième de couverture:
«Et le divin Ulysse émergea des broussailles. Sa forte main cassa dans la dense verdure un rameau bien feuillu qu’il donnerait pour voile à sa virilité. Puis il sortit du bois. Tel un lion des monts, qui compte sur sa force, s’en va, les yeux en feu, par la pluie et le vent, se jeter sur les bœufs et les moutons, ou court forcer les daims sauvages ; c’est le ventre qui parle. Tel, en sa nudité, Ulysse s’avançait vers ces filles bouclées : le besoin le poussait… Quand l’horreur de ce corps tout gâté par la mer leur apparut, ce fut une fuite éperdue jusqu’aux franges des grèves. Il ne resta que la fille d’Alkinoos : Athéna lui mettait dans le cœur cette audace et ne permettait pas à ses membres la peur. Debout, elle fit tête…»
Quelques mots :
Homère! Quand même! En voilà un gros morceau. Mais qu’est-ce qui t’a pris ? pourriez-vous me demander. Eh bien je me suis inscrite à Destockage de PAL en duo avec Bea285. Une motivation supplémentaire pour sortir l’une des deux premières œuvres de la littérature occidentale (rien que ça) de ma pile de livres dormants.
Mon ressenti :
On a tous une idée de ce qui se passe dans l’Odyssée, entre le cyclope, les sirènes, l’arc d’Ulysse… Mais qu’en est-il réellement ? J’ai décidé d’avoir des bases plus solides sur ce sujet. Quand j’ai acheté cette édition, j’en ai donc choisi un livre avec une grosse introduction et plein de notes, de Jean Bérard. Le risque : trop d’introduction peut parfois tuer l’intérêt pour un livre. Ici il faut commencer par surmonter la préface de Paul Claudel. Elle est très courte, mais pleine d’envolées lyriques un peu lourdes. L’introduction plus terre à terre est très intéressante et donne quelques clés de compréhension du récit. Les discussions sur l’appartenance, ou pas, des passages du livre au récit d’origine sont parfois un peu obscures, mais comme elles ont trait à la particularité de ce texte, elles ont leur intérêt (sans doute plus pour des spécialistes ceci dit).
Quand j’ai attaqué l’Odyssée à proprement parler, qu’elle ne fût pas ma surprise de découvrir un texte tout à fait lisible et facilement compréhensible! Oui, j’avoue je n’avais jamais lu Homère, enfin, les écrits correspondant aux poèmes d’Homère (ce ne sont que des retranscriptions moult fois modifiées d’histoire transmises oralement) ou plutôt, attribués à Homère (mais rien n’est sûr quant à son existence, j’arrête ici ma dérive) et je m’en faisais tout un monde. Une fois quelques mots compris (comme aède : poète) et quelques tournures de phrase intégrées, le lecteur peut dévorer une grande aventure, emplie d’épreuves et de rebondissements. On prend sa ration de récits mythologiques (et de sacrifices aux dieux). Il y a bien entendu un second niveau de lecture, mais je ne m’aventurerais pas dans une interprétation allégorique d’Homère, je la laisse aux spécialistes.
Ce qui m’a également surpris, c’est le découpage du récit. Nous avons tant entendu parler de l’épisode des sirènes, par exemple, que je m’attendais à ce qu’il ait une place importante dans le récit. Il tient en 1 page sur 415. Il en va de même pour le passage chez Circé (juste un peu plus long), le séjour sur l’île du cyclope… Les scènes d’action sont en fait très synthétiques. L’échange entre héros est ce qui a le plus de place. Il faut dire qu’à chaque fois que deux personnages se rencontrent, on a le droit à tout leur arbre généalogique. « quel est ton nom, ton peuple et ta ville et ta race » synthétise bien cette façon d’échanger entre les personnages. Le texte est « chantant » et j’ai souvent imaginé le poète, au milieu du théâtre antique, déclamant ses vers.
Les personnages sont d’ailleurs très nombreux et comme ils sont appelés un coup par leur nom, l’autre par leur origine, ou par leur lignée, j’ai mis quelques temps à me repérer. Un exemple, Agamemnon est un achéen, mais également un atride… (achéen : l’ensemble des Grecs rassemblés devant Troie ; atride : lignée d’Atrée), il peut être donc nommé de trois façons différentes.
Au final, cette lecture s’est avérée plus facile que prévue, une fois quelques tournures de phrases comprises et les différents personnages appréhendés. Quel plaisir de croiser Ulysse, Circé, Télémaque, Pénélope, Athéna, Poséidon…. dans un texte poétique. Je pense que je lirais l’Iliade, mais un peu plus tard.
L’autre Écueil, tu verras, Ulysse, est bien plus bas. Il porte un grand figuier en pleine frondaison ; c’est là-dessous qu’on voit la divine Charybde engloutir l’onde noire : elle vomit trois fois chaque jour, et trois fois, ô terreur! elle engouffre. Ne va pas être là pendant qu’elle engloutit, car l’Ébranleur du sol lui-même ne saurait te tirer du péril… Choisis plutôt Skylla, passe sous son écueil, longe au plus près et file ! il te vaut mieux encor pleurer six compagnons et sauver le vaisseau que périr tous ensemble.
A ces mots, Athéna dispersa la nuée : le pays apparut ; quelle joie ressentit le héros d’endurance ! il connut le bonheur, cet Ulysse divin. Sa terre ! il en baisait la glèbe nourricière